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Brassens dans tous ses états : quand la musique de Georges s’ouvre à d’autres influences

La première soirée du Festival « Rendez-vous avec Brassens » organisée par l’association « J’ai rendez-vous avec vous » s’intitule « Brassens dans tous ses états ». Comme l’indique Martin Weiss, Président de l’association, lors du discours d’ouverture, il s’agit surtout de « laisser les jeunes musiciens reprendre Brassens en y intégrant d’autres influences : jazz, lyrique, slam ». Dans la brochure, Joel Favreau renchérit en ce sens : « Les musiques de Georges sont d’une telle richesse qu’elles offrent aux musiciens un terrain de jeu extraordinaire. Chacun peut y apporter son propre éclairage selon son inspiration ou son talent ». Dès lors, le ton de la soirée est lancé. Sur scène, donc cinq musiciens : Dee Dee Abella (chanteuse jazz swing funk soul pop au parcours musical multiculturel), Ulrike Van Cotthem (soprano lyrique au « timbre vocal chaleureux puissant dans l’aigu et chaleureux dans le grave » selon les termes d’une critique musicale), Benoît Marot (basse et contrebasse), Nicolas Del Rox (musicien aux expériences musicales : batteur et vibraphone), Bertrand Papy (chant et guitare). Tout ce petit monde est ici réuni par l’intermédiaire de Pierre Bernon d’Ambrosio que l’on ne présente plus. C’est Dee Dee Abella qui ouvre le « bal » avec trois chansons de Georges qu’elle enrobe d’une tonalité funk électro. Elle danse et ondule devant le micro, elle « scatte » entre les paroles des chansons. L’effet est surprenant et parfois déroutant : on ne reconnait pas toujours les paroles des chansons, on change complètement de genre musical. Un petit regret toutefois : Dee Dee regarde souvent les paroles de sa chanson sur sa tablette et tourne les « pages ». Cela l’empêche de rentrer en contact visuel avec le public sur ces moments-là et c’est dommage.

Nicolas Del Rox
Dee Dee Abella
Benoit Marot

Après Dee Dee, c’est Ulrike Van Cotthem qui prend le relais pour une première mondiale : « une cantatrice d’opéra allemande qui chante du Brassens au vibraphone ». Ulrike et Nicolas interprètent tout d’abord « Pénélope » puis « Il n’y a pas d’amour heureux ». Cette version du poème d’Aragon mis en musique par le poète sétois est particulièrement saisissante : les mots d’Aragon, la musique de Brassens et le registre lyrique se mélangent et « s’additionnent ». C’est très réussi. La chanson commence très doucement avec un vibraphone ténu, puis la voix de la cantatrice s’élève et le vibraphone l’accompagne avec une extrême discrétion sur le début de la chanson. Puis l’accompagnement s’intensifie et les autres instruments entrent progressivement en scène : la contrebasse, la guitare qui bifurque sur une tonalité plus manouche (Bertrand Papy prend le relais sur la partie chanson). Sur la fin, les deux chanteurs se répondent. Cette association produit une intense émotion et la chanson se termine sous les applaudissements fournis du public.

Bertrand Papy

Il est impossible d’énumérer le reste des titres interprétés. On retiendra une version purement instrumentale manouche du « Pornographe » car comme le dit Piou d’Ambrosio, « ce qui est intéressant chez Brassens, c’est surtout la musique 😉 ». Pierre d’Ambrosio qui a rejoint ses camarades sur scène explique ensuite le projet en ces termes : « on a mis les musiciens dans un bocal, on a secoué et ça a donné ça ! ». Il parle ensuite de « musique déstructurée » de la même façon que « l’émission Top Chef déstructure les plats ». La métaphore est surprenante mais très vraie. On arrive ensuite au plus beau morceau du concert selon moi, une version slamée des « Oiseaux de passage » de Jean Richepin suivie par une « Supplique » elle aussi slamée. Sur ces deux titres, les mots mis à nu, comme dénués d’artifices musicaux, ressortent encore plus. On sent une très forte parenté avec les slameurs, les rappeurs. Et même si on n’est pas fan des ces genres musicaux, on se dit que finalement, tous les registres ne se sont pas si éloignés les uns des autres. On érige des barrières, mais en fin de compte, quand on mélange les genres, ces barrières disparaissent et les gens se rapprochent. Je trouve que c’est un beau message d’espoir.

A la fin du concert, Dee Dee revient sur scène. Accompagnée de tous les autres musiciens, elle livre une version jazzy et très réussie de la « Mauvaise réputation ». Les musiciens achèvent le récital avec « Les Passantes » interprétée encore une fois par tous les musiciens. Chaque chanteur revisite le titre avec son style musical et c’est une très belle manière de terminer la soirée en unissant ainsi leurs styles et leurs influences. Il est dommage que le rappel sur « Les copains d’abord » ait été moins réussi. Je pense que le concert aurait dû se conclure sur cette puissante version du poème d’Antoine Pol qui constituait une sorte de climax, de point d’orgue à la soirée. Cette petite réserve n’a pas empêché celle-ci de remporter l’adhésion du public et d’ouvrir d’une très belle manière, le Festival !

2 commentaires sur “Brassens dans tous ses états : quand la musique de Georges s’ouvre à d’autres influences”

  1. Très cher Sebastien… Dans les pénombres , à peine éclairées par les effets scéniques, cherchant toujours le meilleur angle, la plus belle expression artistique « in live » tu réussis la magie du mouvement sur….des images fixées, si éphémères dans le souvenir…et la…c’est du talent…Depuis quelques festivals, je te pressens souvent en quête du meilleur reportage photographique…je te vois en mouvements, parfois en raz de scène, c’est de la technique d’approche, sans dérangements, avec respect pour ceux que ton objectif cherche à séduire…À l’heure où nous croyons être de fabuleux photographes, munis d’une chose qui fait tout à notre place, tu es ici pour nous faire comprendre que l’Art…c’est autrement…Mon cher ami de l’image ( j’en fus un faiseur d’images dans un autre domaine) il me faudrait un temps de pause plus long pour t’exprimer mes félicitations… la bise de Roland

    1. Tu m’émeus Roland. Merci beaucoup pour ton beau commentaire. Je profites de l’occasion pour te remercier toi, les « bénéloves », l’organisation pour la qualité de la programmation et la chaleur de votre accueil. Il est malheureusement de plus en plus rare de pouvoir travailler sereinement à la captation scénique, et St Gély est l’un des derniers lieux où l’on profites de confortables conditions de prise de vue. Alors MERCI.

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