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Les Façonneurs

Façonner des chansons comme on façonne du bon pain

Le premier concert du festival commence donc par un récital donné par un duo breton : « Les Façonneurs » composé, fait rare, par deux hommes : Jean Mataouchek, voix et contrebasse, et Tangui Sevellec, voix et guitare. Ces deux-là se sont rencontré « dans la boulange » et se sont mis à « cuisiner, assaisonner à leur sauce des chansons françaises » qu’il se délectent ensuite à partager. Ce n’est donc pas pour rien qu’ils se nomment « Les Façonneurs » puisqu’ils malaxent, triturent et pétrissent le pain et les chansons !

Si je dois rendre compte à présent de leur spectacle, je m’arrêterais sur quelques instantanés : une « Ronde des jurons » très guillerette où les belles voix graves de Jean et Tangui se répondent comme dans un canon. Sur « Quand les cons sont braves », le son grave et chaud de la contrebasse marque le rythme. Leur « Mala reputación » est également très réussie : ils restent à la fois fidèles à l’original mais le transforment en changeant la mélodie. 

Jean Mataouchek , St Gély du Fesc, 2022, crédit photo Sebastien CHOLIER

J’ai retenu également leur « Mourir pour des idées » au début très épuré. Ici aussi, ils parviennent aussi à distiller leur touche personnelle : l’un fait du « scat » en chantant sans parole, puis l’autre reprend la version initiale de la chanson. Ensuite, ils inversent. Tout cela distille une belle émotion. Le public est sous le charme. Du scat, il y en aura aussi au tout début de leur version personnalisée de « Maman Papa » pour laquelle ils ont tout gardé sauf le texte et qu’ils adressent à leurs parents respectifs : « Maman, Papa / En r’prenant cette chanson / Maman, Papa / On vous dit à not’ façon / Que nous resterons complices / Même si l’un d’nous est absent / Nous resterons votre fils / Mes parents ».

Jean et Tangui ne se cantonnent pas à Brassens, loin de là : au cours de leur tour de chant, ils convoquent également Boris Vian, Charles Trenet (« Le grand café »), Mireille et Jean Nohain (« La plus ceci, la plus cela »). Un moment fort de leur récital est l’hommage rendu à Patachou avec « La chose ». Les paroles sont savoureuses. Jugez-en par vous-mêmes : « Y a ceux qui font la chose / En regardant l’plafond (…) Y a ceux qui font la chose En pensant à l’argent (…) Ceux qui pendant la chose / Poussent des cris violents / Pour que les voisins croient / Qu’ils passent en bon moment ».

Tangui Sevellec , St Gély du Fesc, 2022, crédit photo Sebastien CHOLIER

Vers la fin de leur récital, les Façonneurs surprennent leur public avec un hommage jubilatoire au grand Georges intitulé « Ce rendez-vous avec vous » : une chanson-patchwork qui juxtapose des bouts de chansons de Brassens et qui, à travers les mots touchants des deux interprètes, lui témoigne une véritable reconnaissance. Brassens est « parti sans rime et sans raison » / Et « d’une manière inattendue / Oui, d’une manière inconsolable / Orphelins, nous sommes devenus / Héritiers de tous ces vocables ». Il nous a laissé « ses ritournelles et ses quatrains » mais heureusement, à l’occasion de « ce rendez-vous avec vous », nous nous réunissons autour de « ce bel héritage » que l’on « se partage, grâce à lui et grâce à vous ».

J’ai éprouvé un véritable plaisir non seulement en écoutant cette chanson, mais également en la réécoutant afin de pouvoir vous en citer quelques extraits. Les longs et chaleureux applaudissements du public du chapiteau ont prouvé que pour leur première participation à un festival Brassens, les Façonneurs ont remporté haut la main leur pari : chanter Brassens sans l’imiter mais en y mettant ce qu’ils sont et ce qu’ils ressentent. Nous espérons les revoir très bientôt sur un prochain festival !

Liens

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